Vaisselle Taous au Maroc : histoire, origines et symbolique d’une porcelaine d’exception
Découvrez l'histoire fascinante de la vaisselle Taous, une porcelaine venue d'Asie devenue un symbole du raffinement dans les foyers marocains. 🔹Lire la suite🔹
HISTOIRE
Rédaction Agadir Première
4/29/2025


Connue sous le nom de vaisselle Taous, cette porcelaine délicate aux motifs colorés est aujourd’hui un incontournable des grandes occasions au Maroc. Pourtant, ses origines plongent dans les routes commerciales entre la Chine, le Japon, l’Europe et le Maghreb. Dans cet article, plongez dans l’histoire étonnante de cette vaisselle devenue un symbole du patrimoine culinaire et esthétique marocain.
La vaisselle Taous, du mot arabe « taous » signifiant paon, fait référence à une porcelaine Imari venue d’Extrême-Orient. Son nom marocain provient de l’interprétation populaire du fenghuang, oiseau mythique chinois, dont les motifs sur les assiettes ont été associés au paon par les Marocains.
L’histoire de cette vaisselle commence en Chine, où les artisans maîtrisent dès le premier millénaire la production de porcelaine blanche grâce au kaolin. Les échanges entre la Chine et le monde musulman permettent l’introduction du cobalt persan, donnant naissance au célèbre "bleu musulman", une teinte obtenue à partir de cobalt perse et devenue emblématique des porcelaines chinoises influencées par l'art islamique.
Au 16e siècle, les Japonais envahissent la Corée et déportent des potiers, dont certains introduisent la technique de la porcelaine au Japon. À Arita, un nouveau style naît : le kinrande, mélange de bleu de cobalt, rouge de fer et dorures sur fond blanc. Exportées depuis le port d’Imari, ces pièces rencontrent un immense succès auprès des Européens.
Des origines asiatiques lointaines


Au 17e siècle, la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC) organise le commerce de cette porcelaine vers l’Europe et les côtes musulmanes. Au Maroc, Tétouan et Salé deviennent des escales importantes. Les consuls anglais et hollandais y établissent des comptoirs, offrant ces porcelaines en cadeau diplomatique, comme en 1721 au sultan Moulay Ismaïl.
Parmi les pièces les plus anciennes connues au Maroc, on trouve des plats Imari japonais du 18e siècle, décorés de lions, pavillons, et fenghuangs. La vaisselle accompagne aussi le commerce du thé : les jarres en porcelaine servaient à conserver le thé durant le transport depuis la Chine, liant les deux produits dans l’imaginaire marocain.
La route vers le Maroc


Longtemps réservée aux élites, cette vaisselle gagne les foyers au fil des siècles. Le tabsil taous, plat collectif utilisé lors des mariages et fêtes, devient un symbole de raffinement. On l’offre en dot, on le conserve précieusement, et il trône fièrement dans les vaisseliers familiaux.
Pourtant, la vaisselle taous reste discrète dans les représentations officielles de la cuisine marocaine. Elle est souvent éclipsée par les tagines en terre cuite et la céramique traditionnelle de Fès ou de Safi.
Du luxe élitaire à l’objet familial


Le fenghuang, symbole impérial chinois, est peu connu au Maroc. L’oiseau coloré représenté sur les assiettes est donc perçu comme un paon, oiseau bien plus familier dans la culture locale. Ce glissement donne son nom à la vaisselle : Taous.
Mais le paon n’est pas étranger au monde islamique. On le retrouve sur des ataifor andalous — grands plats partagés — datant du 10e siècle, voire sur des pièces almohades comme celles découvertes à Igiliz. Le tayfour, petite table ronde surmontée d’un plateau, perpétue cette tradition du repas partagé, typique des cultures musulmane et juive.
Un glissement de symbolique : du fenghuang au paon
La vaisselle taous est aujourd’hui toujours présente dans les grandes occasions. Lors de la visite de la reine Elizabeth II au Maroc, elle fut utilisée lors du dîner royal avec Hassan II. Le roi Mohammed VI perpétue cette tradition lors de dîners officiels, soulignant le rôle de cette vaisselle dans l’image du raffinement marocain.
Bien que née en Asie, la vaisselle Taous a été adoptée, intégrée, et réinterprétée par la culture marocaine. Du fenghuang chinois au paon maghrébin, elle symbolise les échanges, la beauté, et la continuité des savoir-faire à travers les siècles.
Une tradition encore vivante




Cet article est réalisé sur la base de la vidéo de M. Frédéric Renn, visible ici : https://www.youtube.com/watch?v=63eTxXJYEI0.
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